Réhabilitation et verticalisation

Évolution du marché immobilier – Partie 2 : deux mots d’ordre – Verticalisation et Réhabilitation

Articles, Analyse du marché

 

Réhabilitation et verticalisation

C’est un fait, le marché immobilier français reste très dynamique. Nous en avons décrypté les ressorts dans un article publié récemment. Il faudrait construire plus pour répondre à une demande toujours plus importante. Mais force est de constater que les solutions d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. Poursuivre l’étalement urbain comme dans les décennies passées n’est plus d’actualité. On a, en effet, beaucoup parlé de souveraineté alimentaire ces dernières semaines. Que ce soit au sujet de la guerre en Ukraine, de l’épidémie de Covid, ou des ambitions écologiques des candidats à l’élection présidentielle, la préservation des terres agricoles françaises et de la biodiversité sont redevenues des priorités (et tant mieux !). Dès lors, réhabiliter, rénover, et surtout densifier, semblent les maîtres-mots. Quelle forme peut prendre ce nouvel urbanisme ?

Pourtant, concentrer l’habitat n’a pas toujours bonne presse auprès des habitants déjà installés, ni de leurs représentants. Comment rendre cette densité, devenue nécessaire, désirable auprès de la population ? Patrimolink vous propose un 2e volet de son analyse du marché immobilier, axé sur les solutions possibles au manque de foncier, et aux opportunités d’investissement qui pourraient en émerger. 


L’émergence de la densification dans l’agenda politique

Les problèmes liés à l’étalement urbain sont devenus un sujet de préoccupation politique depuis les années 1990. L’émergence du concept de développement durable, avec le Rapport Brundtland de 1987, a contribué à leur entrée sur l’agenda politique. De nombreux collectifs de chercheurs, mais aussi les autorités publiques, ont cherché à “refaire la ville sur la ville”, pour reprendre les termes de Citégo

La densification apparaît comme la solution pour économiser les ressources, préserver les espaces naturels et agricoles, et  limiter les nuisances (dont nous avons déjà parlé dans notre précédent article).

Densité et emprise au sol - exemples

En France, la chasse aux “dents creuses” a pris la forme de plusieurs lois. En 2014, la Loi Alur mettait en place le principe d’une “utilisation économe des espaces” et apportait un certain nombre de modifications aux règles d’urbanisme. Elle permet notamment de densifier les espaces bâtis. Dans les quartiers pavillonnaires, les obligations des PLU (Plan Local d’Urbanisme) et des COS (Coefficient d’Occupation des Sols) ont été assouplies. Dans une copropriété, la procédure de vote pour une surélévation a été facilitée (accord des ⅔, et non plus unanimité). Dans les lotissements, les règles de vote pour la subdivision de lots ont été simplifiées. 

En parallèle, des garde-fous ont été mis en place pour limiter l’artificialisation des terres. Le gouvernement encourage en effet les villes vers la “sobriété foncière”. Pour atteindre le “zéro artificialisation nette”, il débloque des aides pour les accompagner dans la construction de foncier plus « compact et désirable”.  

De la même manière, la Loi Climat et résilience (22 août 2021) a mis en place un objectif d’optimisation des espaces urbains pour une grande partie des opérations d’urbanisme (celles concernées par l’art. L300-1 du Code de l’urbanisme). La loi prévoit également que ces opérations soient soumises à : “une étude d’optimisation de la densité des constructions dans la zone concernée, en tenant compte de la qualité urbaine ainsi que de la préservation et de la restauration de la biodiversité et de la nature en ville ».

Comment cette densification peut-elle se traduire dans le bâti ?

 

Réhabiliter, rénover et surélever pour densifier

Compresser le foncier peut évidemment se réaliser par une destruction et une reconstruction complète de quartiers. Cette option “dure”, en vogue en Asie, n’a globalement pas été celle choisie par les collectivités en France, qui lui ont préféré des solutions moins radicales.

Le collectif CITEGO (Cités, Territoires, Gouvernance) a identifié plusieurs formes de “densification douce”, autrement dit sans destruction du bâti existant. Elle peut se matérialiser par :

la division parcellaire avec construction sur parcelles détachées : un propriétaire divise sa parcelle pour la vendre comme terrain constructible. 

la construction d’appartements accessoires : un logement additionnel est construit dans le bien d’origine (combles ou cave aménagés), ou sur la parcelle.

– et plus intéressante : la restructuration interne et/ou externe. Il s’agit de modifier le bâti existant pour le densifier. Ce peut être au moyen de rénovations complètes, pour aménager une colocation ou gagner en efficacité énergétique. Selon les chiffres du gouvernement, 17% du parc actuel est composé de passoires énergétiques (classés E, F ou G). Suite au vote de la loi Climat et Résilience, ces logements vont progressivement devenir difficiles à louer et à céder. On observe déjà aujourd’hui un afflux de ces biens à la vente, avec des prix inférieurs au marché. Il existe donc là un gisement d’opportunités d’investissements intéressant.

Des cabinets d’architectes novateurs se sont également spécialisés dans la verticalisation : grâce à des structures en bois, il est possible d’ajouter un ou plusieurs étages à des bâtiments anciens. L’opération peut s’avérer intéressante pour des copropriétaires qui valorisent ainsi leur patrimoine. En plus de percevoir un pourcentage sur la vente de l’espace à construire, dans la majorité des cas, les promoteurs prennent en charge le ravalement de la façade, la construction d’un nouveau toit, l’installation d’un ascenseur. 

Exemple surélévation-avant

exemple surélévation - après

Crédits images : agence AGA

Ces rénovations et cette nouvelle verticalité de construction changent l’aspect général des centres urbains. C’est assez inhabituel en France, où les villes sont assez plates et l’architecture historique. Pourtant, dans un contexte où la pression démographique s’accentue et le foncier se raréfie, il faudra s’habituer à voir nos villes prendre un autre visage.  

 

Rendre la densité désirable

Si cette densification est une solution au manque de foncier, force est de constater qu’elle ne fait pas toujours l’unanimité. Ses détracteurs dénoncent son coût, sa faisabilité, et remettent en cause son acceptabilité.

Sur l’argument du coût, les calculs divergent. S’il est vrai que les opérations de densification peuvent être chères, d’autant plus que le foncier est compact, mais l’étalement urbain représente aussi un coût non négligeable pour la société et sur le plus long terme (dilution des services publics, pollution, perte de biodiversité). Il s’agit donc avant tout d’une question de volonté politique, et de budget alloué.

L’acceptabilité est un autre sujet d’envergure. Si la densification est un objectif politique, encore faut-il la rendre “désirable”. En effet, accueillir de nouveaux habitants peut effrayer ceux qui sont déjà installés. De la même manière, verticaliser les centres-villes des communes dont l’architecture basse est historique n’est pas toujours bien accueilli. L’équation peut être difficile pour les maires au moment de définir leurs PLU. Toulouse et Pessac en ont montré un exemple avec l’annulation de leur projet par le tribunal administratif de Toulouse en mars et mai 2021. 

Le défi est donc de trouver un chemin intermédiaire entre les besoins de densité et la qualité de vie des habitants. Plusieurs pistes sont déjà d’actualité :

accompagner la densification par des actions d’information auprès des habitants et l’ajustement des services publics (transports, voies publiques, assainissement).

favoriser une offre de logements flexible et modulable, pouvant accueillir de la colocation pour du coliving.

instaurer plus de mixité dans le bâti en construisant ensemble des logements, des commerces, des services de proximité, pour créer des bassins de vie dynamiques et attractifs. 

faire la part belle aux modes de transport doux (marche, vélo, auto-partage) et adapter l’offre de transports publics, pour limiter les nuisances sonores et de pollution liées aux migrations pendulaires. 

privilégier une densification de qualité : respect de l’architecture locale, ou insertion réussie, qualité du bâti et durabilité dans le temps, efficacité énergétique.

Dans son livre “Soft Cities”, David Sims explique qu’accroître la densité ne suffit pas. Il faut repenser la ville pour qu’elle facilite la vie de ses habitants, au niveau de l’habitat, mais aussi des transports et des services.

Illustration soft cities

Crédits : © Gehl/Island Press

Des exemples de rénovations urbaines réussies, comme à Confluence à Lyon ou le Quartier de Bacalan à Bordeaux, montrent qu’on peut créer de la densité désirable et attractive. Ces quartiers, dénigrés au moment de leur construction, sont devenus des localisations de choix pour un investissement immobilier parce que leur rénovation avait été bien pensée. Les investisseurs qui s’y étaient intéressés tôt ont eu une bonne intuition !

Chasse aux dents creuses, verticalisation : la densification du bâti semble inéluctable pour absorber la carence de logements sur le marché français. Quand elle est composée de biens de qualité, offrant un niveau de vie attractif, la densification peut être une solution désirable au manque de foncier.

Dans une perspective d’investissement, ces problématiques urbanistiques doublées de celles environnementales (normes énergétique & co) rendent stratégique de se positionner dès aujourd’hui sur des biens rénovés, au cœur d’opérations de restructurations urbaines bien situées et ambitieuses. C’est notre cœur de métier et nous pouvons vous y aider !

 

 

 

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