Bail nu, bail meublé : la différence tient plus qu’à quelques éléments de mobilier. En effet, la durée du bail, le montant du dépôt de garantie, la durée du préavis (ou congé) et surtout la fiscalité ne sont pas les mêmes. Comment faire le bon choix pour son investissement locatif ? Patrimolink vous aide à y voir plus clair !
Cet article ne traitera pas des statuts LMP et LMNP que nous avons déjà abordés dans des articles précédents (notamment “Non-résident en LMNP- LMP, ce qui change avec la loi de finances 2020-2021”).
Vide ou meublé, que dit la loi ?
La loi ALUR (mars 2014) définit un logement meublé comme suit : “Un logement meublé est un logement décent équipé d’un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d’y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante”. Par opposition, tout logement qui n’est pas meublé est considéré comme loué vide.
La liste de ce mobilier “suffisant” a été définie par le Décret n° 2015-981 du 31 juillet 2015, entré en vigueur le 1er septembre de la même année. Il s’agit de :
– Literie avec couette ou couverture
– Volets ou rideaux dans les chambres
– Plaques de cuisson
– Four ou four à micro-onde
– Réfrigérateur
– Congélateur ou compartiment à congélation du réfrigérateur d’une température maximale de -6°
– Vaisselle en nombre suffisant pour prendre les repas
– Ustensiles de cuisine
– Table
– Sièges
– Étagères de rangement
– Luminaires
– Matériel d’entretien ménager adapté aux caractéristiques du logement (par exemple un aspirateur s’il y a de la moquette, un balai et des serpillières pour du carrelage…)
Un seul élément manquant conduit à la requalification du bien en logement vide. Il est important de garder en tête que ce mobilier devra être en bon état, et que toute réparation ou remplacement sera à la charge du bailleur.
Meubler son logement avec du mobilier de qualité permet de rechercher une clientèle plus ciblée, et de le louer plus cher notamment s’il est bien situé.
N.B : La définition de loyers dans certaines villes est dépendante des décrets dits « d’encadrements des loyers ». Des cas récents montrent qu’il est possible de dépasser le plafond légal grâce à des prestations ou ameublements particuliers offrant des services différenciants. Améliorer son bien en y apportant des prestations particulières peut être une solution pour y déroger. Dans tous les cas, il est conseillé de se rapprocher d’un professionnel pour confirmer cette possibilité et agir en connaissance de cause.
Pour plus de détails sur l’encadrement, voir notre article : “Plus de villes aux loyers encadrés, à quoi s’attendre ?”.
Bail nu, bail meublé : quelles sont les autres différences ?
La durée du bail est la première grande différence. Un bien vide se signe pour minimum 3 ans, un meublé pour 1 an, sauf dans le cas d’un logement étudiant pour lequel la durée minimum est de 9 mois.
Le dépôt de garantie est plus avantageux dans le cas d’un meublé : 2 mois, contre 1 seul dans le cas d’une location classique.
La durée des préavis est un autre point à bien connaître. Dans le cas d’un logement vide, le propriétaire peut donner congé au minimum 6 mois avant la date d’échéance du bail. C’est 3 mois pour un logement meublé. En ce qui concerne le locataire, il peut notifier son départ sous 1 mois dans le cas d’un logement meublé, mais 3 mois dans le cas d’un logement vide.
Avant la loi ALUR, la durée du bail faisait une grosse différence : les propriétaires acceptaient volontiers de payer un peu plus d’impôts en nu pour garder leurs locataires plus longtemps. Son entrée en vigueur a changé la donne. Comme nous le disions, le locataire peut partir à tout moment avec un préavis de 3 mois mais, dans les faits, il est souvent réduit à un mois. C’est notamment le cas si le locataire déménage parce qu’il a trouvé ou a perdu son emploi, ou qu’il a accepté une mutation. Le préavis est aussi écourté si le locataire est considéré comme précaire (en mauvaise santé, titulaire du RSA), ou si le logement est en zone tendue. Le choix vide ou meublé ne se fait donc plus vraiment en fonction de la durée du bail.
Au-delà de ces différences importantes, mais factuelles, choisir le meublé ou le nu est donc avant tout une question de fiscalité.
Bail nu, bail meublé : quelle fiscalité ?
L’imposition, c’est la pierre angulaire de tout projet d’investissement. Bien comprendre les différents types de fiscalité permet de mieux les anticiper et (surtout) les optimiser.
Quelle que soit la nature de vos revenus, il existe deux régimes pour les déclarer : le réel et le micro. Gardez en tête que le choix du réel impose d’y rester pour 3 ans.
Les revenus issus d’une location vide correspondent à des revenus fonciers. Si le montant de vos revenus est inférieur à 15 000 euros, vous serez soumis au régime du micro-foncier. Il vous permet de bénéficier d’un abattement de 30%, et de déduire vos charges (travaux, assurances, intérêts d’emprunt).
Le régime réel s’applique de fait si vous dépassez le seuil des 15 000 euros, vous pouvez aussi le choisir volontairement. Vous devez alors déclarer vos revenus réels : revenus – les charges (travaux, assurances, intérêts d’emprunt).
Les revenus issus d’une location meublée sont enregistrés sous la catégorie BIC (Bénéfices Industriels et Commerciaux). Dans les faits, le régime micro-BIC est appliqué par défaut en dessous de 72 600 euros de revenus par an. Ce régime prévoit un abattement forfaitaire équivalent à 50% des revenus pour les charges. C’est un régime assez simple, les revenus sont directement reportés sur la déclaration de revenus. Les obligations comptables sont limitées. Par contre, il n’est pas possible d’imputer de déficits, ni de pratiquer d’amortissement.
Le régime réel s’applique dans plusieurs cas :
– si vous dépassez le seuil des 72 600 euros de revenus,
– si vous acheter en indivision (le micro-BIC n’est pas possible sous indivision qui est au réel d’office),
– si vous le choisissez volontairement.
Vous pourrez alors déduire l’intégralité de vos charges de votre déclaration, y compris l’amortissement du bien lui-même et de l’achat des meubles. Contrairement aux revenus fonciers, la liste des charges imputables sous le régime réel en BIC n’est pas définie par la loi. Elles doivent cependant être effectives, liées avec l’activité de location, et appuyées par des pièces justificatives.
L’amortissement se définit comme la prise en compte de la perte de valeur d’un actif, en l’occurrence le bien, du fait de son utilisation dans le temps. Il est apprécié chaque année. Son calcul est complexe et soumis à débat, mieux vaut se fier à un expert-comptable. On peut retenir que le montant déclarable est limité.
Les obligations comptables du régime réel sont plus lourdes que celles du micro-BIC. Il impose de tenir une comptabilité, et donc de faire appel à un expert-comptable.
Le changement de l’un à l’autre des régimes est possible, et parfois intéressant fiscalement, à condition de le faire dans les délais impartis par la déclaration d’impôts à venir.
Dans le cas de revenus fonciers, le passage de l’un à l’autre se fait simplement en remplissant sa déclaration d’impôts.
Dans le cas de revenus BIC, la question se pose surtout pour le passage au réel. Passer du micro-BIC au réel peut être intéressant dans le cas où on veut lancer des travaux importants l’année suivante. Il devient en effet possible de les déduire. Détail important : il faut opter pour le réel auprès de services fiscaux, c’est une démarche volontaire. Le mieux est d’écrire à votre centre des impôts via une lettre recommandée avec accusé de réception.
Deux cas de figure sont possibles :
– Dans le cas d’une première mise en location, on peut opter pour le réel au plus tard le 30 avril de l’année N, pour déclarer ses impôts de N-1. N’attendez pas la dernière minute pour faire les démarches. Obtenir son numéro de Siret auprès des greffes du Tribunal de Commerce prend un minimum d’un mois. Il vaut mieux anticiper pour ne pas être hors délais.
– Dans le cas d’un logement déjà en location, la date limite pour le faire a longtemps été le 1er février de l’année en cours. Depuis le 1er janvier, elle a été reportée à la date limite de dépôt de votre déclaration de revenus (mai – juin en fonction de votre zone géographique et de votre mode de dépôt, papier ou électronique).
Par exemple, si vous êtes taxés en micro-BIC mais souhaitez passer au réel pour l’année N, vous avez jusqu’à mai-juin N (dépôt de la déclaration de vos impôts pour N-1) pour vous signaler auprès des services fiscaux. Vos revenus de l’année N seront imposés au réel, en année N+1, puis l’année suivante (renouvellement tacite).
Il n’y a pas encore d’information concernant le renouvellement de ce report de déclaration.
Quelle que soit votre stratégie, il est toujours préférable de faire une étude comparative, une simulation pour mieux évaluer et anticiper.
Voici un exemple concret pour mieux comprendre les implications de votre choix de régime. Le calcul a été volontairement simplifié.
Dans les faits, le réel est souvent privilégié en début de projet pour pouvoir déduire plus de charges. Le basculement peut être intéressant par la suite quand le montant des charges déductibles s’avère inférieur à celui des abattements forfaitaires proposés.
Changer un bail vide en meublé et vice-versa
Il est possible de changer la nature du bail, mais sous certaines conditions. Dans tous les cas, il est préférable d’attendre le départ de votre locataire. Si vous souhaitez lui donner congé pour procéder au changement de bail, vous devez respecter le délai légal : 6 mois avant la date d’échéance du bail pour un logement vide, et 3 pour un meublé.
NB: Pour rappel, pour reprendre un bien mis en location, le propriétaire doit motiver sa décision. Trois raisons sont possibles légalement : la reprise pour y loger (lui-même ou sa famille), la vente (le locataire est alors prioritaire pour acheter), un motif sérieux et légitime (dégradation du bien, non-paiement des loyers, …).
Il faut également bien prendre garde aux conséquences fiscales de votre choix : passer du BIC au foncier peut être lourd. Il est donc rare de changer un bail meublé en bail vide.
Pour changer un logement vide en logement meublé, il faut (bien évidemment) le doter de tous les éléments d’ameublement listés par la loi. Le type de fiscalité étant différent, le bailleur devra s’inscrire au registre du commerce.
Pour plus de détails, voir notre article : “Basculer de la location nue à meublée ou inversement dans les règles”.
Louer en nu ou en meublé : la fiscalité est souvent au cœur du choix.
Bien déclarée et bien gérée, la location meublée permet une optimisation fiscale et une rentabilité intéressante.
Toutes les stratégies d’investissement ne sont cependant pas interdépendantes de l’élimination de l’impôt. Dans certains cas, le nu peut s’avérer une option compétitive, notamment lors d’un basculement possible au statut LMP. C’est pourquoi il est primordial de procéder à des simulations pour comparer les scénarios et investir en connaissance de cause
Si vous souhaitez être accompagné dans cette démarche, n’hésitez pas à faire appel à notre équipe de professionnels.
Dessin : Denis Boutant
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