Alors qu’on pensait le marché immobilier reparti de plus belle après l’épisode Covid, les remous politiques et économiques de 2023 sont venus apporter leur lot de nouveautés. 2023 a marqué la fin de l’embellie exceptionnelle des dernières années. Soutenus par des taux historiquement bas, les volumes de ventes y avaient atteint des records et les prix avaient connu une belle croissance. Depuis, le coût du crédit a augmenté, l’inflation a fait son grand retour, entraînant le marché dans une nouvelle phase de transition et d’adaptation.
Quels ont été les ajustements intervenus en 2023 ? Que nous réserve 2024 ? Spoiler alert : le marché immobilier français est et reste une valeur sûre, offrant de belles opportunités. PATRIMOLINK vous offre son analyse détaillée de 2023 pour vous aider à mieux vous lancer en 2024.
Un marché immobilier qui résiste
2023 a rebattu les cartes du marché immobilier français. Après des années de hausse continue des volumes de ventes et des prix au m2, le marché s’est contracté. Les Notaires ont enregistré 885 000 transactions à la fin de novembre 2023, comparativement à 1 208 000 sur l’année précédente.
La baisse peut impressionner mais, étant donné les conditions économiques qui l’expliquent, elle témoigne d’une réelle résistance du marché immobilier français comme actif de placement.
L’économie française a subi une inflation en hausse et un ralentissement significatif de l’activité économique globale. L’immobilier, comme les autres secteurs, ne pouvait pas y échapper. Il a cependant montré sa solidité avec un volume de ventes qui reste conséquent. Il se rapproche des chiffres de 2018 (965 000 ventes), considérés par les Notaires à l’époque comme très bons, avant qu’ils n’atteignent des records les trois années suivantes. On peut voir cette dynamique comme un retour à une situation plus « normale » et saine du marché.
Des taux d’intérêt en voie de stabilisation
Pour mémoire, les volumes records des années 2020 et 2021 étaient portés par des taux d’intérêt historiquement favorables (autour de 1%). Or, cette tendance s’est inversée depuis fin 2022. Les chiffres de la Banque de France montrent une multiplication des taux globaux par 4 depuis le dernier trimestre de cette année. Tous les acteurs du marché s’attendaient à un rééquilibrage tôt ou tard.
Cette brusque augmentation est le résultat direct de la politique de lutte contre l’inflation de la Banque Centrale Européenne. En élevant ses taux directeurs, elle a poussé les banques à ajuster leurs taux commerciaux, et à accroître le coût du crédit immobilier.
Plus que le niveau, c’est en effet la vitesse d’augmentation des taux qui a posé problème. Si on compare avec nos voisins européens, ou que l’on jette un coup d’œil aux montants des années passées, un taux de 4% ne semble pas si extravagant. A la fin des années 1990, on empruntait souvent autour de 9%, hors assurance. Le coût actuel du crédit en France est en accord avec une réalité de marché. Par contre, le rythme très rapide de cette accroissement a pu bloquer l’accès au crédit.
C’est en raison du taux d’usure, notion méconnue du grand public qui a pris toute son importance en 2023. Il s’agit du taux maximum auquel une banque peut prêter. Calculé par la Banque de France, il a pour but de protéger les clients de taux excessifs. Au cours de l’année dernière, la BF a accepté de revoir ce taux de façon mensuelle (et non plus trimestrielle) pour mieux s’ajuster en urgence à la hausse très rapide du coût du crédit. Certains dossiers d’investisseurs se sont retrouvés pris en ciseaux entre ces deux taux, et techniquement exclus de l’emprunt.
Qu’attendre de 2024 ? Très probablement une accalmie au niveaux des taux. Selon les relevés de l’Observatoire Crédit Logement-CSA, le taux moyen pour les emprunts sur 20 ans devrait se stabiliser autour de 4.5% pour un non-résident. L’augmentation de l’inflation semble se tasser. D’après l’Insee, 2023 montre un ralentissement des prix à la consommation. On peut donc espérer que les taux directeurs s’ajusteront progressivement à la baisse, limitant la hausse des taux commerciaux. On peut déjà constater que les banques reviennent sur le marché du crédit immobilier, un bon produit d’appel pour attirer de nouveaux clients.
Une nouvelle dynamique est en train de se mettre en place, avec des conditions toujours propices. L’emprunt immobilier reste un levier efficace d’enrichissement et un vrai rempart contre l’inflation, surtout en France. Notre cadre juridique français protège et favorise l’emprunteur. Les taux sont fixes, et peuvent être renégociés à la baisse (jamais à la hausse). Voir notre article sur le sujet.
Une revalorisation des loyers continue
La hausse de l’inflation n’est pas synonyme que de mauvaises nouvelles. L’IRL est lui aussi en augmentation. Pour mémoire, il s’agit de l’Indice de Référence des Loyers publié par l’Insee tous les trimestres (voir graphe ci-dessous). Il détermine le plafond maximal d’augmentation de loyer exigible par un propriétaire, quand le bail prévoit une clause d’ajustement annuel du loyer.
La loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 a mis en place un plafonnement temporaire et dérogatoire face à inflation exponentielle et rare de la variation de l’IRL entre le 3e trimestre 2022 et le 1er trimestre 2024 à 3,5 %. Même capée, cette réévaluation est intéressante : peu d’autres produits se valorisent à 3,5% annuels dans le contexte actuel.
L’augmentation de l’IRL permet aux propriétaire bailleurs des hausses de revenus fonciers, une excellente nouvelle pour l’investissement locatif.
Des fondements de marché toujours dynamiques
Autre argument en faveur d’un placement sur le marché français de la pierre : le dynamisme intrinsèque du marché. La demande de logements ne faiblit pas dans l’hexagone, comme le montre l’augmentation de la tension locative nationale.
On définit la tension locative comme le ratio du nombre de biens disponibles comparé à celui des candidats locataires. Selon l’étude publiée par LocService.fr, la tension locative a augmenté sur l’ensemble du territoire de 2,71 en 2022 à 3,35 en 2023.
Cette réalité s’explique par plusieurs facteurs concomitants. Tout d’abord, l’offre : le marché français connaît un manque chronique de logements. La construction neuve est loin d’être suffisante (voir les chiffres de la Note de conjoncture Notaires de France – Octobre 2023, ci-dessous). En 2023, elle a rencontré de nombreuses difficultés : resserrement du crédit, pénuries de main d’œuvre, augmentation des coûts de la construction, ruptures de stock de matériaux, baisse de l’octroi de permis de construire en raison de la politique de lutte contre l’étalement urbain (voir notre article sur le sujet).
Face à cette offre en berne, la demande explose. Elle est poussée par la croissance démographique, certes de moins en moins importante, mais toujours positive. La population française a augmenté de 0.3 % en 2023 (solde naturel de + 47 000 pers.), comme en 2022 (contre 0.4% en moyenne entre 2014 et 2019) (voir graphes Insee ci-dessous).
La taille des ménages est en net recul. Comme le dit l’Insee : « Les ménages sont de plus en plus petits car les unions sont plus fragiles et la population vieillit. ». L’allongement de la durée de vie en bonne santé et la hausse du nombre de divorces soutiennent la demande de logements.
Le cumul de tous ces facteurs booste le marché du locatif. L’immobilier français est soutenu par des fondamentaux solides, qui ont montré leur robustesse sur au travers des crises. Le neuf, traditionnellement plus cher, offre aujourd’hui de belles marges de négociation.
Un ajustement des prix très attendu mais encore peu visible
La baisse du pouvoir d’achat et le renchérissement du crédit mettent la pression sur les prix. Beaucoup d’acteurs du secteur l’attendaient comme une conséquence mécanique. Or, les Notaires notent que « l’ajustement annoncé des prix se met timidement en marche, les vendeurs n’acceptant pas encore de baisse substantielle de leur prix » (sauf obligation à vendre rapidement). L’attentisme des vendeurs est compréhensible, c’est tout un logiciel de lecture du marché qui est à mettre à jour.
Autre raison pour laquelle la baisse n’est pas encore visible : la forte croissance des années précédentes. Charles Marinakis, Président de Century 21 France parle d’une baisse « en trompe l’œil » : « Il faut quand même rappeler que de 2015 à 2022, les prix n’ont cessé de croître en France : +34% pour les maisons, et +26,6% pour les appartements. Sur cette période, en moyenne, un bien immobilier a donc vu sa valeur augmenter de +4% par an ! Le recul actuel des prix ne vient même pas gommer une année de hausse… ».
Même peu perceptible encore, cette diminution est en train de se produire : les prix ont baissé de 1 % sur un an en août 2023 en France métropolitaine, une première depuis fin 2015. La réduction est hétérogène géographiquement et qualitativement. Selon les Notaires (voir tableau ci-dessous), elle est plus forte pour les maisons anciennes (-3.2%) que les appartements (-2.7%) sur l’ensemble du territoire. Les centres des grandes agglomérations comme Nantes, Amiens, Lyon, ou Toulon et même Paris et la région francilienne ne sont pas épargnés. Toute l’Île de France connaît une baisse de 6%, donc plus forte que sur le reste du pays, tous types de biens confondus.
Attention, ces moyennes sont à prendre avec précautions. Tous les arrondissements de Paris n’ont pas diminué de 6%, certains augmentent toujours. Il faut donc se garder de généralités et étudier de près le contexte de votre achat pour être sûr d’acheter au bon prix. Voir notre article sur le sujet.
Une dynamique des prix orientée par des facteurs externes
Les biens affichant un mauvais Diagnostic de Performance Énergétique sont davantage concernés par une baisse de valeur. Les logements classés G consommant plus de 450 kWh/m²/an en énergie final) ne sont plus considérés comme décents depuis janvier 2023 et exclus du marché. Depuis fin août 2022, il est de plus interdit d’augmenter les loyers des logements classés F et G.
Les investisseurs (et leurs banques) savent que, dorénavant, d’important travaux seront nécessaires pour tirer profit de ces maisons et appartements. Ces contraintes impactent la valeur des biens concernés : par rapport à une étiquette D, un appartement classé F ou G perdra 2 à 11% de sa valeur, 3 à 19% pour une maison en moyenne. Les Notaires parlent de la « valeur verte » d’un bien.
On assiste à une transformation du marché tel qu’on le connaissait. La dynamique habituelle des prix s’est inversée : les zones périphériques se renchérissent plus vite que les centres-villes. La demande se reporte actuellement sur les périphéries de ces grandes villes (plus accessibles en termes de prix), les villes moyennes et les communes (semi-)rurales (dans l’aire d’influence d’une ville dynamique).
Certaines villes tirent néanmoins leur épingle du jeu comme Nice, ou Brest, en raison d’une forte tension locative. C’est pourquoi il faut se garder des généralités annonçant des baisses conséquentes partout en France.
2023 a été une année charnière, sans aucun doute. Les records de transactions portés par un crédit facile et peu cher sont derrière nous. Mais plus qu’une « crise » ou un « effondrement » de l’immobilier français, il faut y voir un rééquilibrage progressif du marché en faveur des acquéreurs. Ce retour à des volumes et des prix plus en accord avec la réalité du marché était attendu des professionnels du secteur, qui tablent aujourd’hui sur une reprise au cours de 2024.
Les facteurs venus impacter le secteur étaient avant tout exogènes, ils n’ont en rien entamé la robustesse intrinsèque du marché. Si la dynamique a évolué, les fondamentaux de l’immobilier français restent très solides. Aux investisseurs d’en tirer les conséquences et se savoir en saisir les opportunités ! Comme le dit l’adage : « il faut acheter au son du canon, et vendre au son du clairon ».
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